PLF 2026 : une contribution inédite des collectivités au redressement des finances publiques, aux conséquences incertaines pour l’investissement local

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 marque une nouvelle étape dans la trajectoire de redressement des comptes publics.

Les collectivités territoriales y sont appelées à contribuer de manière significative, dans un contexte de croissance modérée et de tensions politiques autour de l’adoption du budget.

Ce projet de budget est en cours de discussion et d’amendement par le Parlement dans un contexte d’instabilité politique et de rapports de force renouvelés.

Les mesures présentées ci-dessous sont par conséquent susceptibles d’évoluer.

Données macroéconomiques et cadre général

  • Objectif de déficit public : 4,7 % du PIB en 2026 (contre 5,4 % en 2025), avec un retour sous les 3 % visé en 2029.
  • Croissance du PIB : +1 % prévue pour 2026 ; inflation : +1,3 %.
  • Structure de l’effort budgétaire : environ deux tiers du redressement proviendraient de la maîtrise des dépenses publiques.

Les collectivités locales sont fortement mobilisées pour participer à cet effort. En 2025, elles représentaient 18,7 % des dépenses publiques pour moins de 10 % du déficit. En 2026, leur part dans la dépense totale reculerait à 18,4 %, et leur contribution au déficit à 6,4 %.

Un effort budgétaire significatif demandé aux collectivités 

Dans la copie initiale (Gouvernement Bayrou), le Gouvernement attendait des collectivités territoriales une économie globale de 5,3 milliards d’euros, soit 13 % de l’effort national, contre 2,2 milliards en 2025. Dans la version du PLF déposé en octobre, cet effort est ramené à 4,6 Md€. A cela s’ajoute la hausse de 3 points du taux de cotisation à la CNRACL, étalée sur quatre ans, représentant 1,2 milliard d’euros supplémentaires en 2026. La croissance des dépenses de fonctionnement serait encadrée à un niveau proche de l’inflation (+1,3 %), afin d’assurer la cohérence avec la trajectoire nationale de redressement.

Les principales mesures budgétaires

Dotation globale de fonctionnement (DGF)

  • Stabilisation à 27 Md€, soit le niveau de 2025, sans indexation sur l’inflation, ce qui représente un manque à gagner de 1,2 Md€ pour le bloc communal.
  • Rétablissement d’une part régionale de DGF, supprimée en 2018, pour un montant équivalent à la fraction de TVA attribuée en 2025.

DILICO

  • Reconduction du dispositif, avec une enveloppe doublée (hors remboursement de 30 %, soit 333 M€).
    • Communes : 720 M€ (contre 250 M€ en 2025)
    • EPCI : 500 M€ (contre 250 M€)
    • Départements : 280 M€ (contre 220 M€)
    • Régions : 500 M€ (contre 280 M€)
  • Le reversement du DILICO est désormais conditionné à une évolution des dépenses locales (fonctionnement + investissement) inférieure à la croissance du PIB (~1 %). Les collectivités ne respectant pas cette règle perdront le bénéfice de la correction.

Fraction de TVA et FCTVA

  • Gel partiel de la fraction de TVA en raison du recul anticipé du produit en 2025.
  • Réduction du champ d’éligibilité au FCTVA (–735 M€) : certaines dépenses d’entretien, informatiques ou de bâtiments publics seraient exclues.
  • Décalage d’un an du versement du FCTVA pour les GFP et EPT (N+1 au lieu de N).

Autres ajustements :

  • DCRTP : baisse pouvant atteindre –66 % pour certaines communes.
  • Fonds vert : nouvelle réduction de 500 M€, après –1,15 Md€ en 2025, soit un fonds limité à 600 M€ en 2026.
  • Fusion des dotations d’investissement (DETR, DSIL, DPV) dans un Fonds d’investissement pour les territoires (FIT), doté de 1,4 Md€ en AE et 1 Md€ en CP, destiné à la revitalisation des centralités rurales et urbaines.
  • Baisse des contributions aux agences de l’eau et de l’habitat : –90 M€ et –700 M€ respectivement, soit –790 M€ au total.
  • Abondement du Fonds de sauvegarde des départements de 300 M€ en ciblant mieux les départements les plus fragiles

Enfin, la hausse du taux de cotisation à la CNRACL entraînera environ 1,2 Md€ de dépenses supplémentaires pour les budgets locaux.

Des estimations divergentes du coût réel pour les collectivités

Le Gouvernement chiffre à 4,6 Md€ l’effort global demandé aux collectivités en 2026 avec notamment une baisse de 1,6 % des concours financiers de l’État (hors fiscalité transférée). Les associations d’élus jugent ce chiffrage sous-évalué et l’effort réel atteindrait environ 8 Md€, soit environ 1,5 % des recettes consolidées du bloc local.

Des risques majeurs pour l’investissement et la transition écologique

Des associations d’élus alertent sur une possible baisse de 20 % des marges d’investissement pour les communes et intercommunalités. Aussi, en l’état, le PLF 2026 suscite une forte inquiétude sur l’ampleur de l’effort budgétaire exigé et fait craindre :

  • un ralentissement marqué de l’investissement public local,
  • un effet récessif sur l’économie nationale,
  • et un désengagement des collectivités dans les politiques de transition écologique

💬 Un décryptage de Yann Doyen, Directeur des engagements – AFL et Henri Daudignon, Analyste Crédit – Chargé d’études secteur public – AFL